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La chèvre des fossés est une race caprine française, son berceau de race se situe dans le grand ouest (de l’estuaire de la Seine à celui de la Loire). Cette race quasiment méconnue il y a encore une quinzaine d’années a actuellement le vent en poupe, passant d’environ 80 individus femelles dans les années 2000 à 1200 femelles en 2016 !

Chevre fosses2Cette chèvre considérée autrefois comme « la vache du pauvre » est en train de se créer une solide réputation grâce au travail de plusieurs éleveurs passionnés.

C’est un animal très rustique, de une taille moyenne. Sa robe est très variée. Elle présente tous les patrons de couleur, mais on exclut néanmoins la couleur chamoisée, typique de la chèvre Alpine. La chèvre des fossés arbore le plus souvent des cornes (assez impressionnantes chez le mâle) mais peut également être motte, c'est-à-dire naître sans corne. Ses oreilles sont courtes et portées en cornet quand l’animal est à l’écoute. Son poil est plus ou moins long sur tout le corps et présente souvent une épaisse bourre en hiver qui la protège de l’humidité de son terroir d’origine. Cette chèvre présente d’excellentes qualités maternelles, la prolificité s’élève en moyenne à 1,7 chevreaux par chèvre.

Chevre fosses3Une bien belle histoire :
La chèvre des fossés est parfois appelée « chèvre commune de l’ouest », car elle trouvait sa nourriture sur les talus et fossés de la Bretagne, de la Normandie et des Pays de la Loire, régions qui forment son berceau d'origine.
Elle était élevée dans les milieux les plus modestes et n’avait pas de statut reconnu, c’était « la chèvre du pays ». C’était la vache du pauvre, fournissant lait, viande, peaux et même travail aux ruraux sans terres et aux plus petites gens.
Le plus souvent élevée au piquet, elle se nourrissait de ronces et broussailles sur les bords de routes et dans chemins creux (c’est ce qui lui a d’ailleurs valut son nom).
Elle fournissait 2 chevreaux tous les ans, qui étaient généralement consommés pour Pâques ou les communions. Son lait servait à confectionner de « la piquette » fromage frais sous forme de faisselle. Les boucs servaient même parfois de bête de somme en tractant une petite charrette.

Dans les années 70-80, victime de l’industrialisation, des remem-brements et de l’urbanisation de la population, ce petit élevage vivrier, qui ne rapportait pas grand-chose mais ne coûtait rien, est peu à peu abandonné et délaissé au profit de l'élevage moderne et des races améliorées.

Chevre fosses4Une prise de conscience
A la fin des années 80, le conservatoire du littoral achète les falaises de Jobourg dans la Hague. A cet endroit vit depuis toujours un troupeau « sauvage », ces chèvres avaient auparavant des propriétaires. Les paysans locaux entretenait ce cheptel en y apportant régu-lièrement de nouveaux boucs et en prélevant les chevreaux surnuméraires. Ce mode d’élevage, abandonné depuis les années 60, est à l'origine de ce troupeau féral. Malheureusement, au moment de sa découverte, l'équilibre de ce troupeau est menacé, avec une quinzaine de mâles pour seulement 5- 6 femelles. Le conservatoire du littoral s’évertuera alors à préserver ce troupeau et à en inverser le sex ratio.

En parallèle Laurent Avon, ingénieur de l’institut de l’élevage, commence des recherches sur la race. Il signale alors l’existence de cette population à l’écomusée du pays de Rennes, qui constitue à cette époque un conservatoire animal.
Des prospections sont entreprises par Jean-Paul Cillard, zootechnicien de l’écomusée du Pays de Rennes, d’abord en Bretagne ou quelques animaux de souche plus ou moins pures sont retrouvés, puis dans la Manche, où en lien avec la chambre d’agriculture, quelques femelles de phénotype pur sont retrouvées. Ces chèvres sont mises à la reproduction avec les boucs du troupeau sauvages, et vont ainsi constituer une partie des animaux fon-dateurs du cheptel actuel.

A cette époque (fin des années 90), un comité pilote se met en place autour de la race.

Dans le même temps, des particuliers passionnés ont participé à des opérations individuelles de collectage : à la fin des années 90, le cheptel compte une petite centaine d’individus plus ou moins purs.
Les Chevre fosses5effectifs remontent alors lentement et la race est offi-ciellement reconnue en 2004. En 2007 naît l’association de sauvegarde et de promotion de la chèvre des fossés. Cette association qui gère la race compte actuellement environ 180 adhérents.

Aujourd’hui 
La race compte désormais environ 1200 femelles et un peu plus de 200 boucs. Elle est détenue en majorité dans des petits troupeaux appartenant à des amateurs passionnés de la conservation animale. Plusieurs collectivités et des professionnels l’utilisent en éco pâturage, notam-ment les boucs castrés (débouché supplémentaire pour les mâles surnuméraires). De plus en plus de professionnels s’installent en transformation fromagère avec la chèvre des fossés, son lait présente un très bon rendement froma-ger, et elle valorise très bien les fourrages grossiers et les ligneux : elle produit assez peu de lait, mais d'une qualité adaptée à la transformation fromagère, et peu cher à produire.

L’Association de promotion et de sauvegarde de la chèvre des fossés est très dynamique, de nombreux projets et actions Chevre fosses6sont mis en place. Dernière action en date, une pépinière de chevrettes créée 2016, et renouvelée en 2017, a pour but d’aider de futurs professionnels à se fournir en chevrettes prêtes à produire. Le marché des reproducteurs est très tendu et il est très difficile de trouver des animaux disponibles en quantité et en qualité. La création de pédigrées certifiant que l’animal est bien de race « chèvre des fossés », est également une action récente mise en œuvre par l'association, apportant la garantie et une sécurité pour les éleveurs, et facilitant les échanges de reproducteurs.

L’avenir semble plus serein pour cette chèvre, patrimoine vivant de nos régions, ressortie des oubliettes par quelques passionnés, et particulièrement bien adaptée dans l'actuel contexte agricole et environnemental.


 

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