La saison de reproduction a commencé pour beaucoup d'oiseaux et pour la plupart des Estrildidés, les éleveurs se préoccupent de trouver des pâtées, des insectes vivants et peut-être aussi le "complément miracle" qui amènera la réussite. Toutes ces préoccupations sont tout à fait légitimes, mais n'oublions pas qu'à la base, nos petits Estrildidés sont essentiellement granivores, et que la réussite n'est pas possible sans un bon mélange de graines.


Les mélanges du commerce contiennent en diverses proportions du millet blanc, du millet jaune, du millet roux, différentes millades, de l'alpiste, et en moindres quantités, du chènevis, de l'avoine pelée, du niger, etc.

Les amateurs qui ne détiennent que quelques couples achètent généralement leurs graines en animalerie par petites quantités (sacs de 1 à 3 kg).

Les éleveurs qui "écoulent" de plus grandes quantités de graines font plutôt appel à des graineteries spécialisées qui vendent des nourritures de qualité professionnelle à moindre coût. Mais dans les deux cas, il est difficile de connaître avec précision (ou l'on ne prend pas la peine de vérifier) la composition exacte des mélanges que nous donnons à nos oiseaux, et surtout de savoir si le mélange choisi suffit à satisfaire les besoins de base de l'oiseau.

Nos amis éleveurs d'indigènes savent à quel point un bon mélange de graines est crucial pour garder les oiseaux en bonne santé. De grandes firmes se sont intéressées à cette famille d'oiseaux et proposent des mélanges très complets (12 à 20 sortes de graines dîfférentes par mélange) adaptées à chaque genre d'oiseaux (bouvreuils, tarins, linottes....
Mais nos Estrildidés semblent être les parents pauvres parmi les granivores car il n'existe pas de mélanges aussi complets à leur intention. Les amateurs éclairés supplémentent donc le mélange du commerce avec de l'alpiste, et parfois aussi d'autres graines choisies en fonction des besoins de l'oiseau (millet blanc, riz paddy, graines de santé....)
A la lecture de quelques ouvrages de qualité sur l'élevage des Estrildidés, je me rends compte qu'il y a souvent un monde entre ce qui se vend et ce qui convient aux oiseaux.

Pour la plupart des Estrildidés, nous pouvons donc classer ainsi les graines les plus importantes :

Panis rouge et Panis jaune (qui, réunis, doivent composer 30 à 55 % du mélange) : ce sont de tout petits millets, contenant principalement des glucides (55 %), une proportion modérée de protéines (11 %) et très peu de graisses (3 %). Ce sont les graines de la Sétaire d'Italie (Setaria italica), une graminée que l'on donne souvent aux oiseaux sous la forme de "millet en grappes" jaune ou rouge. Il en existe différentes variétés, y compris des espèces qui poussent à l'état spontané en France ( par exemple la Sétaire verticillée, Setaria verticillata) : leurs épis font le régal de tous les granivores en été, à l'état mi-mûr ou mûr.

 

Alpiste : même s'il s'agit d'exotiques, la "graine des canaris" (Phalaris canariensis) doit composer 15 à 30 % du mélange destiné aux Estrildidés, voire 50 % du mélange pour les espèces de Diamants océaniens qui ont le plus de propension à l'obésité. L'Alpiste est une graine légère, contenant principalement des glucides (58 %), des protéines (15 %), et elle est pauvre en graisses (5,5 %). Elle ne peut faire que du bien à nos oiseaux et doit être utilisée en plus grande quantité que dans la plupart des mélanges du commerce.
Le prix de l'Alpiste a beaucoup augmenté depuis 2001 en raison de mauvaises récoltes dans les pays de production (Hongrie, Canada). Ce prix devrait à nouveau baisser en septembre 2002. À noter que le coût généralement élevé de cette graine fait que les mélanges en contiennent souvent très peu, afin que le prix de revient au kilogramme soit plus économique pour le producteur ! C'est tout de même la graine principale de tous les mélanges pour petits granivores. Cette graminée pousse à l'état spontané dans le Midi de la France.

Millet blanc : c'est une graine ronde et brillante, appelée aussi "millet rond" ou "millet français". Elle provient, comme le millet rouge, d'une graminée, le Panic faux-millet (Panicum miliaceum). Légèrement plus grosse que le panis, la graine de millet blanc doit composer 10 à 20 % du mélange. Elle contient environ 60% de glucides, 12 % de protéines et 4 % de lipides. Elle pousse aussi à l'état spontané en France. Ses épis ne ressemblent pas du tout à ce que l'on nomme "millet en grappes"

Millet japonais : cette graine mate et grise, provenant du Panic pied-de-coq (Ecbinochloa crus-galli ftumentacea, famille des graminées), est moins connue que les précédentes, et pourtant elle devrait entrer dans nos mélanges avec la même proportion que le millet blanc ! En effet, c'est le millet le plus ricbe en protéines (12,6 %), il contient également plus de 60% de glucides et moins de 5 % de lipides. Un grainetier d'île-de-France m'a récemment indiqué qu'il conseillait le Millet japonais à tous ses clients éleveurs d'Estrildidés. On trouve l'espèce sauvage Echinochloa crus-galli dans les campagnes en été, les oiseaux adorent picorer leurs graines mi-mûres.

Quelques graines de moindre importance doivent entrer, autant que possible, dans la composition du menu de nos oiseaux : millet rouge, périlla. Le millet rouge correspond à la même espèce botanique que le millet blanc.

Le périlla (Perilla frutescens) est plus gras que toutes les graines déjà citées : contenant 30 à 51 % de lipides, il est réputé pour sa teneur en acides gras alpha-linoléniques (Oméga 3) et l'huile extraite du périlla est actuellement très en vogue aux Etats-Unis, en médecine humaine, pour la lutte contre les problèmes cardio-vasculaires et les allergies. Il s'agirait donc d'une "bonne" graisse ! Leur intérêt pour les oiseaux pourrait être développé ici, mais j'ignore si des études sérieuses ont été menées sur ce sujet.
D'autres graines peuvent être ajoutées au mélange pour lui apporter plus de variété et des oligo-éléments : chicorée, gazon, trèfle, carotte, sésame, pétilla brun, plantain, laitue blanche et noire, niger, caméline cultivée ("gold-of-pleasure", quinoa, chardon, riz paddy, avoine pelée, fonio, paddy...)
Toutes ces graines peuvent être données de façon alternée afin de varier le régime des oiseaux suivant la saison, et les graines les plus grasses (niger, périlla, caméline, sésame...) seront toujours données avec parcimonie (une pincée de chaque graine oléagineuse par kilogramme de mélange, par exemple, pour un total de graines "rares" de moins de 3 %, soit 30 grammes par kg de mélange).

En toute saison, les oiseaux apprécient un petit ramequin de "graines de santé". En ce qui me concerne, je le confectionne moi-même à partir d'un mélange de qualité (donc cher) pour tarins ou serins indigènes, qui peut constituer un mélange "santé " tout à fait acceptable pour les Estrildidés, ou à défaut, un mélange de "graines de santé" du commerce, mais attention : la variété des graines doit être visible à l'oeil nu, et la composition doit être clairement indiquée, car il existe des mélanges de mauvaise qualité vendus à un prix bien trop élevé.
En ce qui me concerne, comme j'essaie de varier le mélange au maximum et que j'ai la chance d'avoir un bon grainetier près de chez moi, j'ajoute aux graines pour petits fringillidés indigènes un peu des différentes graines énumérées dans le paragraphe précédent, avec des variations suivant mon humeur, les saisons et la disponibilité.

Voici le détail du mélange que je confectionne pour mes Estrildidés africains :
* 26 % de Panis rouge
* 24 % de Panis jaune
* 16 % d'Alpiste
* 10 % de Millet blanc
* 8 % de Millet rouge
* 3 % de Périlla blanc
* 3 % d'autres graines : chicorée, trèfle, sésame, ray-grass, pâturin, caméline, niger, périlla brun, laitue blanche...

Si je dois m'occuper temporairement de Diamants australiens ou océaniens, je rajoute de l'Alpiste à ce mélange (environ 250 grammes d'Alpiste avec 1 kg de mon mélange "africains").
Pour des Sénégalis sanguins récemment rapportés de Belgique pour des amis éleveurs, j'ai ajouté du Riz paddy, comme faisait le marchand (environ 100 grammes par kg de graines) mais on peut aussi bien le donner séparément. Je pense que je ferais de même pour des Diamants quadricolores ou des Diamants des bambous, qui se nourrissent principalement avec ce riz non décortiqué à l'état sauvage, sans en abuser non plus, car la ration deviendrait vite trop monotone.
A noter que les Diamants de Gould d'une de mes connaissances ont été récemment guéris de troubles intestinaux, tout simplement en ajoutant de l'Alpiste dans leur mélange du commerce ! Ceci prouve, s'il en était encore besoin, les vertus de cette graine bien équilibrée. En revanche, les graines de chènevis et d'avoine pelée, trop grasses, sont à proscrire.

Une demière remarque : que votre mélange soit acheté dans le commerce ou "fait maison" à partir de graines achetées séparément, privilégiez la qualité : graines brillantes, non poussiéreuses, dégageant une agréable odeur de noisette. Un mélange de graines "économique" mais de piètre qualité ne vous donnera pas autant de satisfaction dans votre élevage.
Quel est l'intérêt d'acheter des graines au rabais si l'on doit ensuite se miner en compléments alimentaires pour compenser la pauvreté du mélange de base ?
Une fois vos graines achetées, gardez-les dans un local bien sec à l'abri des rongeurs, mais ne les stockez pas trop longtemps et remuez-les, vérifiez-les fréquemment pour être sûr qu'elles n'ont pas ranci et qu'elles ne sont pas la cible de ravageurs (insectes, souris). Si c'était le cas, jetez-les sans regret car elle peuvent être toxiques pour vos oiseaux.

Il serait intéressant que les différents éleveurs d'Estrildidés qui liront ces lignes nous fassent part de leurs propres pratiques, afin que nous puissions publier une synthèse des mélanges utilisés.

Philippe Brunet adhérent du Club Technique des Estrildidés de la région toulousaine et spécialiste des Diamants australiens et océaniens, m'a gentiment indiqué un mélange qu'il utilise avec satisfaction depuis plusieurs mois :
* 42 % d'Alpiste
* 22 % de Panis rouge
* 12 % de Millet japonais
* 12 % de Millet blanc
* 9 % de Panis jaune
* 1 % Graines de santé
* 1 % Graines sauvages
* 1 % de Périlla brun
* 1% de Périlla blanc
* + 1 cuillère à café de charbon par kg et 1 pincée de poudre Insecticide (Carbaryl à 5 %).

Pour les Erythrurés, Philippe donne dans des godets séparés du riz paddy et du gruau d'avoine (les Diamants des bambous sont les seuls à ne pas toucher au gruau). Ce mélange convient également aux Capucins donacoles et Capucins à poitrine blanche.
Attention toutefois avec le gruau d'avoine, graine très grasse qui ne doit jamais être donnée à volonté à certaines espèces (Diamant de Kittlitz...), mais tout au plus en toute petite quantité pour ne pas les faire grossir.

Petite bibliographie non exhaustive :
KINGSTON Russel. Keeping and breeding finches and seed-eaters. Indruss Productions, 1998.
De Afrikaanse prachtvinken. Over Dieren, 2002. NBvV (Pays-Bas).
De papegaai amadine. Over Dieren, 2002. NBvV (Pays-Bas).
Cet article est déjà paru dans la rubrique du Club Technique des estrildidés ( http://clubcte.free.fr) de la revue "Les oiseaux du Monde" n° 198 (juin-juillet 2002), éditée par l'UOF-COM France ( http://www.uof.asso.fr)

Adresses courriel :
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Philippe Brunet : Cette adresse e-mail est protégée contre les robots spammeurs. Vous devez activer le JavaScript pour la visualiser.

 

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